Lundi 19 mai, 3 anciens lauréats devenus membres du jury ont pris la parole en ouverture de la cérémonie de remise des prix. Retranscription de ces témoignages montrent d’une part, la détermination des associations à faire ensemble et à continuer à développer des projets pour animer les territoires et d’autre part, le constat difficile et douloureux que, dans le contexte actuel, souvent, cela ne suffit plus.
Frédérique Trousson-Vogler, directrice générale
La Ligue de l’enseignement de Vaucluse
lauréat du Prix Waldeck 2022 / Coopérations plurielles avec La Cour du Spectateur
Il existe des projets qui ne naissent pas d’une ambition individuelle, mais d’une volonté collective. Des projets qui n’existent que parce qu’ils sont portés ensemble, avec envie, avec persévérance, avec la conviction qu’une autre façon de faire société est possible.
La Cour du Spectateur est de ceux-là.
En recevant en 2022, le Prix Waldeck du Mouvement Associatif – catégorie Coopérations plurielles, La Cour du Spectateur a vu son essence même reconnue : celle d’un projet profondément enraciné dans l’esprit de réseau, de solidarité et de coopération, au cœur des valeurs que défend depuis toujours le monde associatif.
À une époque où les logiques de compétition s’intensifient, où les ressources se raréfient et où l’accès à la culture reste inégalement réparti, La Cour du Spectateur s’affirme comme une réponse politique et humaine. C’est un lieu de culture, certes, mais aussi un espace de justice sociale, où l’art devient un droit, un vecteur d’émancipation, un terrain commun où chacun peut se reconnaître, se surprendre, se relier aux autres.
Ce projet, porté par la Ligue de l’Enseignement de Vaucluse, réunit des compagnies artistiques du spectacle vivant jeune public, des associations affiliées, la Ville d’Avignon, des bénévoles, des acteurs de terrain, des partenaires locaux. Ensemble, ils font plus que partager un lieu ou un programme : ils fabriquent du commun.
Chaque décision, chaque aménagement, chaque instant de médiation naît d’un processus collectif, nourri par la confiance, la mise en réseau et la mutualisation des ressources et des intelligences.
Alors que certains disaient que c’était trop complexe, trop fragile, trop ambitieux… ils l’ont fait. « Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. » Ce proverbe pourrait à lui seul résumer l’élan de La Cour du Spectateur : une audace tranquille, nourrie par le collectif.
Le Prix Waldeck est bien plus qu’une récompense. Il incarne une reconnaissance nationale de cette manière de faire ensemble, d’agir autrement, de refuser l’isolement des initiatives.
Il a été un tremplin pour le projet, renforçant sa visibilité, sa légitimité, et sa capacité à mobiliser. Mais plus encore, ce prix est une confirmation : la coopération est fertile. Elle est efficace. Elle est politique. Aujourd’hui, La Cour du Spectateur grandit. Elle inspire. Elle fédère. Elle s’ouvre à l’avenir, avec la création prochaine, en 2026, d’une association dédiée pour poursuivre, consolider et essaimer ce modèle.
Car il ne s’agit pas seulement de faire vivre un lieu pendant le Festival d’Avignon. Il s’agit de montrer que le lien est une force, que la culture appartient à toutes et tous, que l’association est encore – et plus que jamais – un moteur de transformation sociale.
Faire ensemble. Faire avec. Faire pour. Telle est la voie que nous traçons, jour après jour, au sein de cette grande famille qu’est Le Mouvement associatif.
Timothée Tafforeau, co-président
Jouons Ensemble
lauréat du Prix Waldeck 2022 / Emploi avec Un tremplin pour l’emploi
Frustration. C’est le sentiment général qui ressort trois ans après avec reçu notre prix Waldeck. Frustration de ne pas avoir pu aller au bout de notre objectif. Frustration de savoir que nous l’atteindrons plus. Frustration d’avoir même reculé, comme toutes les politiques publiques en faveur du monde associatif, du social, de la culture, de l’éducation, du médico-social, de la santé… La liste est tellement longue !
Petit flash-back : mai 2022, l’association se porte bien, nous venons de recevoir avec grande joie le prix Waldeck et nous souhaitons poursuivre notre réflexion sur notre modèle. On réalise un DLA pour réfléchir sur la pertinence de poursuivre notre action en matière d’insertion et d’emplois auprès des publics éloignés, dans d’autres proportions. Nous en ressortons avec un objectif, celui de déposer un dossier pour être entreprise d’insertion, prêts à engager nos fonds propres dans ce projet. Mais nous ne rentrons pas tout à fait dans les cadres. Alors nous faisons le choix de poursuivre notre action, telle que nous le faisions, telle que vous, nos pairs, vous l’aviez reconnu.
Et puis les fonds se tarissent, à croire qu’accompagner les plus précaires n’est plus une priorité de l’état. Qu’aider les plus vulnérables à se réinsérer dans notre société n’est pas une nécessité. Que chaque peine d’emprisonnement soit une peine à vie, tant l’état ne souhaite plus croire que l’on peut réintégrer un détenu.
Notre association n’est qu’un exemple parmi tant d’autres associations employeuses, qui se demandent comment encore tenir une année, comment voir une éclaircie quand l’on ne parle que de conflits, de sécurité, de coupes budgétaires, d’instabilité.
Nous aurions aimé vous envoyer de l’optimisme, vous dire au combien notre association a su valoriser le prix Waldeck pour monter de nouveaux projets, créer de nouveaux horizons. Alors bien sûr, nous avons continué à travailler, nous avons continué à imaginer de beaux projets, à les partager avec des gens tout aussi passionnés.
Mais malheureusement, c’est une association fatiguée, en danger qui se présente à vous, des administrateurs et des salariés épuisés de voir la nécessité et la qualité du travail et de l’engagement associatif ignorés, méprisés.
Merci au Mouvement associatif de tenir pour nous, qui essayons de continuer à œuvrer au quotidien pour faire bouger les lignes et de nous rappeler que nous ne sommes pas seuls. Non, nous ne sommes pas seuls.
Cédric Chaligne, directeur général
Zellidja
lauréat du Prix Waldeck 2019 / Pratiques numériques avec Zellidja.com
Zellidja, depuis 85 ans, ce sont des bourses qui permettent aux jeunes d’accomplir un voyage solitaire qui leur apportera autonomie, confiance, tolérance et de nombreux outils pour la vie qu’aucun cursus scolaire ne pourra jamais leur donner.
Nous avons eu la joie d’être lauréats d’un prix Waldeck des pratiques numériques lorsque nous avons opéré la refonte de notre site internet, dans le but notamment de gérer nos candidatures et nos actions de promotion — mais le numérique n’est pas le cœur de notre activité !
Ce que Zellidja défend avant tout, c’est la possibilité pour un jeune, avant 20 ans, de comprendre via un voyage avec un sujet d’étude de son choix, que la grande majorité de ses interlocuteurs seront prêts à l’aider, le guider et le soutenir. Tous nos lauréats en témoignent : cela a changé leur vie. Et beaucoup, plus de 50 ans après leur voyage Zellidja, nous sont toujours fidèles.
La refonte de notre site internet a constitué un tournant : elle a permis de fluidifier l’accès aux bourses pour les jeunes, en rendant les démarches plus simples, plus claires et plus accessibles. Elle a également allégé considérablement la charge de travail de nos bénévoles, qui peuvent désormais se concentrer pleinement sur l’accompagnement des jeunes, cœur de notre mission.
Nous remercions chaleureusement les Prix Waldeck pour leur soutien dans cette étape essentielle. Depuis, nous avons poursuivi notre transition numérique avec l’adoption de nouveaux outils tels qu’Airtable pour centraliser et gérer notre base de données, et Make pour automatiser des tâches répétitives et chronophages. Ces améliorations nous permettent de rester fidèles à notre engagement tout en renforçant l’efficacité de notre action.
Tous les ans, nous organisons une cérémonie de remise des bourses et des prix pour la nouvelle promotion. Cette année, elle aura lieu le 13 juin à la BnF. Si vous êtes intéressé·e·s, contactez-nous !