La publication du livre que vous avez co-dirigé avec Isabelle Combes, constitue en quelque sorte le « mode d’emploi » d’une fondation. Quelles sont les fondements historiques du développement des fondations en France?
Les fondations existaient déjà sous la royauté; elles étaient importantes, créées par des congrégations religieuses qui bénéficiaient de grosses donations, argent ou terre, de la part de gens fortunés, car elles avaient en charge de s’occuper de la pauvreté et de l’hospitalisation. Dissoutes à la Révolution, réintroduites par Napoléon, elles n’existaient que sous une forme: la fondation reconnue d’utilité publique. Il faut attendre 1987 pour voir la première loi sur les fondations, complétée en 1990, par la création des fondations d’entreprise. Le véritable développement des fondations en France, date de la loi Aillagon de juillet 2010, qui reconnaît aux fondations un rôle dans les actions d’intérêt général, apporte des compléments aux statuts type et surtout donne une fiscalité attractive à tout le secteur de la collecte de dons. Depuis, ont été créées par l’Etat, la fondation de coopération scientifique (avril 2006), la fondation partenariale (août 2007) et la fondation hospitalière (juillet 2009). Enfin, à ces diverses catégories, s’ajoute un instrument spécifique créé par la loi du 4 août 2008 et largement inspiré du modèle anglo-saxon des endowment funds: le fonds de dotation.
Votre ouvrage est présenté de manière très pédagogique. Créer une fondation, c’est compliqué? Pouvez-vous nous présenter les quelques grands types de fondations en France?
Créer une fondation n’est pas difficile, si l’on connaît les textes et si l’on a un projet clair; aussi est-il important de s’appuyer sur des personnes ayant une expérience certaine sur le sujet. Les fondations sont régies par un appareil juridique et fiscal fourni, ainsi que par une jurisprudence du Conseil d’Etat; c’est pourquoi après une période de grand développement, il semblait important de rassembler toutes les règles dans un manuel fait avec une maison d’édition reconnue dans le domaine juridique, comme l’est Dalloz. Nous avons aussi voulu, au cours des chapitres, donner des exemples qui éclairent les choix qu’ont pu faire tels ou tels fondateurs ou fondations.
Les fondations sont de deux types: soit elles sont opératrices, soit redistributrices. Dans le premier cas, elles gèrent des établissements principalement dans le domaine social ou médical, mais pas seulement; par exemple, l’institut Pasteur est une fondation dont dépendent tous ses chercheurs. Si l’on prend pour exemple la Fondation des Apprentis d’Auteuil qui gère des établissements pour des jeunes en difficulté, on comprend que le fait d’être une fondation apporte un supplément d’attention porté aux jeunes, et s’inscrit dans une perspective humaniste.
Les fondations sont régulées par un conseil d’administration qui a la responsabilité de l’exécution de l’objet social. Les fondations importantes ont mis en place des systèmes de reporting et de contrôle. Elles peuvent être contrôlées par la Cour des comptes, différentes inspections des ministères en fonction de leur objet social; celles qui font appel à la générosité publique ont adopté un contrôle par un des organismes privés existants (Comité de la Charte, IDEAS, Veritas..) et bien sûr, elles ont un commissaire aux comptes. Un grand nombre d’entre elles sont regroupées au sein du Centre Français des Fonds et Fondations, qui assure une formation collective, afin de donner à ce secteur les conditions d’exercice transparent et éthique.
Source observatoire de la fondation de France
(FRUP: fondation reconnue d’utilité publique; FE: fondation d’entreprise; FA: fondation abritée; FCS: fondation de coopération scientifique; FP: fondation partenariale; FU: fondation universitaire.)
Quels sont la nature des liens entre les fondations et les associations? Sont-ils amenés à évoluer selon vous?
Les fondations de distribution apportent des financements sous forme de prix, bourses ou subventions. Elles sont en contact avec les associations, pour soutenir leurs projets. Mais les fondations ne sont pas des banquiers: elles élaborent des stratégies de programmes sur des besoins identifiés, souvent avec l’aide du secteur associatif ou d’experts. Ces fondations créées soit par des personnes privées, soit par des entreprises, apportent des financements de plus en plus importants à travers le temps, et permettent soit d’amplifier les actions des associations, soit de combler des réductions de financements publics. Les relations entre ces deux types d’organisations doivent se renforcer pour mieux se connaître, et renforcer l’impact des actions entreprises au bénéfice de tous.