Les évolutions du secteur associatif
Viviane Tchernonog (CNRS-Matisse) a commencé par rappeler les évolutions connues par le secteur associatif ces dernières années.
Alors que le budget global des associations a augmenté de 2,5% par an en moyenne entre 1999 et 2005, les financements publics n’ont augmenté que de 1,6% par an. Il n’y a donc pas de désengagement public comme on peut parfois l’entendre, mais plutôt une modification des sources de financement des associations, qui se tournent de plus en plus vers les financements privés (+ 3,9% par an en six ans). Les financements publics se sont par ailleurs restructurés : l’Etat se désinvestit peu à peu pour laisser la place aux collectivités locales, conséquence de la politique de décentralisation, et de nouvelles formes de financements publics émergent, avec un passage fréquent des subventions aux prestations.
Concernant l’emploi dans le secteur associatif, il a augmenté de 2,5% par an entre 1999 et 2005, contre 1% pour l’emploi global. Ce chiffre séduisant cache cependant une réalité moins agréable, celle de la précarité d’une partie importante de l’emploi associatif : CDDs, temps partiels…
Contrairement à l’idée régulièrement reprise d’une crise du bénévolat, le travail bénévole a augmenté suivant un taux de 5% par an. Les difficultés que rencontrent les associations pour renouveler leurs forces vives viendraient alors plus d’une difficulté d’adaptation aux réalités modernes de l’engagement.
Les jeunes et le bénévolat
C’est notamment vrai en ce qui concerne les jeunes bénévoles. Désireux de diversifier les expériences, d’être impliqués dans le projet des associations dont ils sont membres, de plus en plus mobiles… Ces caractéristiques semblent mal prises en compte par les associations. Les jeunes adhèrent pourtant bien au modèle associatif, d’après l’enquête européenne sur les valeurs de 2008.
Les résultats de cette enquête, présentés par Bernard Roudet (sociologue à l’INJEP), sont à mettre en relation avec ceux de la même étude menée en 1990 et 1999. On se rend alors compte que le taux d’adhésion à une association est stable à 37%, et toujours plus important chez les diplômés (47% à bac +3, 24% au niveau bac). Mais l’on parle ici d’adhésion, l’investissement bénévole est bien en-deçà de ces chiffres, à 19% pour les 18-29 ans (23% pour la population totale).
Quelles sont les associations plébiscitées par les jeunes ? Avant tout celles qui sont centrées sur le partage d’une activité commune, sportive (19%) ou culturelle (7%). Néanmoins, la part des associations liées à la vie citoyenne augmente, ce qui laisse à penser que l’engagement associatif se construit de plus en plus en complémentarité du politique, dans un contexte de politisation croissante de la jeunesse.
Qu’en pensent les responsables associatifs ?
Christophe Paris, directeur général de l’AFEV (Association de la Fondation Etudiante pour la Ville), a insisté sur la corrélation existant entre l’évolution de la société et celle de la participation des jeunes à la vie associative. Le passage à une société de loisirs et de consommation, fortement marquée par la crise économique, s’accompagne d’un besoin accru des jeunes d’individualiser leur parcours et d’entrer rapidement dans le concret. La question de l’insertion professionnelle est toujours très présente dans un contexte de fort chômage des jeunes.
Ahmed El Khadiri, délégué général d’Animafac, s’est arrêté sur les caractéristiques propres à l’engagement des jeunes. En termes temporels, celui-ci est calqué sur l’année universitaire. Le turnover est très fort (les responsables restent en moyenne 18 mois en poste dans le monde étudiant), il est donc important de rentrer rapidement dans le concret. Ce besoin de voir les choses s’incarner se retrouve dans la forte identification des jeunes aux actions associatives plutôt qu’aux valeurs et projets globaux.
Attirer les jeunes bénévoles… et les garder
Au vu de ces différents points, comment faire pour attirer les jeunes dans une association ? Pas de recette miracle pour Ahmed El Khadiri et Christophe Paris, mais quelques pistes. Tout d’abord, impliquer les jeunes dans la prise de décision : ils sont en effet peu présents dans les conseils d’administration en dehors des associations étudiantes. A ce sujet, Viviane Tchernonog rappelle que le fait d’inscrire le renouvellement des instances dirigeantes dans les statuts permet de renforcer leur diversité.
Ensuite, prendre en compte la diversité de la jeunesse et adapter les formes d’organisation aux nouvelles réalités sociales : accueil des bénévoles, écoute de leurs envies, etc. Les jeunes sont désireux de s’engager auprès des associations, mais il faut que celles-ci soit à même de leur offrir des conditions adaptées.